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ISBN : 978-2-916724-56-0
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Introduction et traduction par Olga Medvedkova. Préface de Véronique Schiltz, membre de l’Institut.
Cet ouvrage a reçu le Prix du festival de l’histoire de l’art de Fontainebleau.
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Le décorateur des Ballets russes, Léon Bakst, rêvait de la Grèce antique. En 1907, avec un autre peintre russe, Serov, il prit le bateau et visita Olympie, Delphes, etc...
Un an avant sa mort, en 1923, installé en France auprès de Serge Diaghilev, Bakst écrira Serov et moi en Grèce. Ce texte n’est donc pas à proprement parler un récit de voyage sur le vif !
Il évoque leur attente impatiente à tous les deux de la rencontre avec la Grèce apprise dans les livres : « On désirait tout ce qu’il y avait de plus antique possible, le plus proche d’Homère. »
Bakst se souvient des œuvres d’art copiées de concert, du travail accumulé. Du partage, des brouilles... Il savoure la sensualité des danses. Il transcrit ses impressions face à la nature grandiose, son étonnement devant la multiplicité des types humains rencontrés. Il mêle le souvenir des menues déceptions et tracas quotidiens de la Grèce moderne aux émotions esthétiques les plus intenses.
Cet ouvrage est la première traduction en langue française d’un morceau exquis de la prose russe symboliste. Non seulement ce texte est un petit chef-d’œuvre en soi, mais il permet de jeter un regard nouveau sur l’un des principaux acteurs des Ballets Russes et de comprendre comment ce voyage en Grèce a influencé et déterminé toutes les créations ultérieures de Léon Bakst.
Du tableau Terreur antique aux décors et costumes de l’Après-midi d’un faune, mêlant au souvenir de la Grèce antique un orientalisme sensuel et coloré, Bakst inspire tout un courant dans l’art et la mode du début du XXe siècle. L’auteur de cette traduction et de l’essai introductif tente de retrouver les sources dans l’effervescence intellectuelle de la Russie au tournant du siècle et de saisir l’originalité de l’hellénisme de Bakst.
Je tourne le dos à l’hôtel et en reste baba : un précipice gigantesque, sans fond dans la nuit, tout près de mes pieds… quelque part, tout en bas dans la vallée, sous les éclairs aveuglants bleu-mauve, reposent les temples blancs de marbre - maisonnettes de conte tombées en poussière entre les mains monstrueuses des Cyclopes… Est-ce par colère qu’ils les jetèrent des montagnes verticales et lugubres qui entourent, de leur chœur malveillant, le hardi sanctuaire blanc ?
En fendant impérieusement les ténèbres, les volées d’aigles géants planent, inquiets, en traçant des courbes impétueuses dans toutes les directions ; dans l’air épais, étouffant, plein de phosphore et d’électricité, on entend de trop près, juste sous nos pieds, le bruissement affreux de leurs ailes robustes…
Je m’éloigne involontairement du précipice… L’ombre de Ganymède glisse craintivement dans ma pensée… Le fracas assourdissant et le scintillement sont si forts, qu’il semble que l’éclair nous transperce tout entier - nous tenons à peine debout. Instinctivement nous nous tournons du côté de la trattoria et son air simple d’opéra atténue l’acuité de nos sentiments…
Serov affirme qu’il a faim ; je sens une sorte de reconnaissance pour ce revirement vers le banal besoin quotidien ; dans la salle qui comporte une table proprement dressée, parmi les bouteilles noires, mon œil ascétique remarque avec satisfaction des œufs durs posés sur un monticule de sel gris, plusieurs fromages frais et une assiette d’amandes et de raisins secs.
Quel plaisir de dîner sous le bas plafond blanc, de s’essuyer avec des serviettes propres brodées aux tons vifs, de siroter, avec du vin âpre, une somnolente conversation culinaire à propos des repas montagnards, du fromage de chèvre, bien meilleur que le fromage hollandais que l’on servait avec du pumpernickel sec chez Leiner à Pétersbourg . Ô, ce restaurant de Leiner !
Sentimental, je me répands au sujet de la vieille et respectable madame Leiner, grosse veuve violette d’apoplexie, au sujet de ses dîners classiques pour un rouble d’argent - restaurant dans lequel nous étions d’honorables habitués de longue date.
– Certes, honorables ! Tu te souviens quand elle nous a offert à chacun un authentique petit verre d’argent en signe de notre fidélité décennale ? Tu te souviens ? Tu te souviens quelle bière munichoise étonnante on y servait ? Noire, épaisse… et les Allemands de chez Leiner - quel drôle de peuple !
– « Kannst-du noch , Androuchcha ?
– Absoluuuuument ! »
Serov rit avec bonhomie, allume pensivement son cigare. De Delphes, de l’orage - on ne dit pas mot.
Mais avant de me coucher, tel le duc de la cavatine de Rigoletto, dans ma chambre minuscule et étouffante, j’ouvre largement la fenêtre qui, elle, n’est pas de théâtre.
L’orage grandit et se renforce. Par moment le vent romantique se calme et le silence lourd, précurseur d’un épique fracas assourdissant, devient insupportable, comme le spasme d’un enfant qui, juste après une chute, se tait pendant trois horribles secondes et tout à coup déchire l’air de son cri frénétique et, néanmoins, quelque peu apaisant.
De larges éclairs coupent sans cesse l’œil avec leur rasoir géant ; le précipice sans fond sous la fenêtre paraît alors encore plus velouté et sauvage.
Il y a un cauchemar atroce, véritable torture dans lequel tu n’arrêtes pas de tomber d’une hauteur effroyable dans une profondeur noire et inconnue, et ton corps est titillé jusqu’à la nausée par le sentiment de l’absence de sol sous tes pieds… Ce que je ressentais en me forçant à tenir bon contre l’orage devant la fenêtre ouverte était proche de ce cauchemar : ce chatouillement, le frère de la mort, s’approchait de moi…
Quel étrange, quel terrible décor !... Tout autour, sur les rochers, comme dans un colisée des Cyclopes, comme dans une volière magique faite pour des aigles géants, bâillent des trous profonds et noirs, des niches - sépultures abandonnées des pèlerins de l’Hellade et de l’Étrurie, des tombeaux des philosophes, des pontifes ayant vécu, étudié, professé près du sanctuaire glorieux.
Depuis longtemps se putréfièrent les ossements des stoïciens et des sophistes, bâtisseurs de systèmes ingénieux, chercheurs du sens de l’existence… Mais toujours, comme il y a trois mille ans, au printemps, Zeus tonne au milieu de la volée d’aigles effrayés par les éclairs et, chaque printemps, dans les ténèbres de l’Hadès, Perséphone pétrifiée de douleur - torve, terrible, assise dans son profond fauteuil de basalte - attend chez elle avec méchanceté, de la terre interdite et florissante, les enfants du soleil crédules et fragiles : les hommes…
Peintre russe, il devient en 1898 l’un des fondateurs avec Diaghilev du mouvement Le Monde de l’Art.
Il expose à Paris, à la Galerie nationale, et est chargé de l'aménagement décoratif de l'exposition russe au Salon d'automne en 1908.
Il devient, dès leur naissance, le collaborateur privilégié des Ballets russes, pour lesquels il réalise costumes et décors jusqu’en 1921.
Olga Medvedkova est historienne de l’art et écrivain. Née à Moscou, elle vit en France depuis 1991 et choisit d'écrire en français. Directrice de recherche au CNRS, elle est auteur de nombreux ouvrages d’histoire de l’art et de l’architecture, d'essais, de nouvelles, de contes et de deux romans : L’Education soviétique (le prix Révélation 2014 de la SDGL) et Les Anges stagiaires.
En 2017 elle a reçu le prix Lequeux de l’Institut de France pour l’ensemble de son œuvre.
Son site : olgamedvedkova.blog4ever.net
Écoutez l'interview de Olga Medvedkova sur francefineart.com.
Chaque semaine, en séance publique, Académiciens et Correspondants de l’Académie présentent des ouvrages récemment parus dans les domaines d’activité de l’Académie. Ces « hommages » sont, par la suite, publiés dans les Comptes rendus des séances de l’Académie (CRAI).
Chaque semaine, en séance publique, Académiciens et Correspondants de l’Académie présentent des ouvrages récemment parus dans les domaines d’activité de l’Académie. Ces « hommages » sont, par la suite, publiés dans les Comptes rendus des séances de l’Académie (CRAI).
Bakst n'est pas seulement le génial créateur des ballets russes : il est aussi un écrivain sensible et profond, comme le prouve cet étonnant voyage en Grèce, un texte introuvable même en russe et jamais traduit dans une autre langue. Un petit bijou !
La traduction est accompagnée d'une grande introduction passionnante sur l'artiste et son milieu, le tout très bien illustré des tableaux de Bakst et Sérov.
J'attendais un carnet d'artiste qui cherche, comme il l'a d'ailleurs fait, dans ces lieux antiques, son graal artistique, et je suis étonnée de trouver mieux que cela. Mais pas d'affectation, pas de prise de notes techniques : une atmosphère tellement vraie que j'ai non seulement visualisé les lieux, mais rapproché de cette vision des quantités de sens, ce qui m'arrive rarement quand le texte n'est pas ostensiblement descriptif.
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Critique sur www.babelio.com
Du vendredi 02 juin 2023 au dimanche 04 juin 2023
Château de Fontainebleau
Entrée libre
Du vendredi 04 juin 2021 au dimanche 06 juin 2021
58 rue de Paradis - 75010 Paris
Entrée libre
Du vendredi 19 mars 2021 au dimanche 21 mars 2021
58 rue de Paradis - 75010 Paris
Entrée libre
Du samedi 16 février 2019 au dimanche 17 février 2019
Mairie du Ve arrondissement de Paris
21, place du Panthéon - 75005 Paris
Du vendredi 05 octobre 2018 au dimanche 07 octobre 2018
Centre spirituel et culturel orthodoxe russe
1 quai Branly - 75007 PARIS
Entrée libre
Du mardi 22 novembre 2016 au dimanche 05 mars 2017
Bibliothèque-Musée de l'Opéra de Paris
Réservations sur le site de l'opéra
Du dimanche 23 octobre 2016 au dimanche 15 janvier 2017
Villa Sauber, Nouveau Musée National de Monaco
6 €
Le dimanche 15 janvier 2017
Espace TriArtis
19 rue Pascal - 75005 Paris
Entrée libre dans la limite des places disponibles
Réservation par téléphone au 09 51 74 96 29 ou par mail