X PROPOS DE TRAVAUX RÉCENTS SUR LA MISSION VOULET -CHANOINE
par FINN FUGLESTÂD
La mission Voulet-Chanoine redevient d'actualité puisqu'une thèse et un récit romancé viennent de lui être consacrés. Jacques-Francis Rolland n'a pas écrit un livre d'histoire à proprement parler. Son récit n'en présente pas moins un intérêt certain pour les historiens, puiqu'il est d'une grande fidélité aux sources. Et là où ces mêmes sources font défaut, Rolland nous offre des reconstitutions crédibles et certainement plausibles. Tout au moins peut-on regretter qu'il insiste un peu trop lourdement sur l'aspect scandaleux et sensationnel de la mission — mais n'est-ce pas là la raison d'être de son livre ? — et qu'il n'ait pas songé à se poser certaines questions ou à tirer des conclusions, dont certaines s'imposaient pourtant1.
Mme Muriel Mathieu, elle, vient de soutenir une thèse de troisième cycle particulièrement réussie, dans laquelle ni les questions pertinentes, ni les hardies ne manquent2. Et pourtant, on ne peut pas lui faire le grief de s'être éloignée des sources qu'elle suit au contraire de très près. Cette thèse est d'autant plus la bienvenue qu'il s'agit, à ma connaissance, du premier travail réellement scientifique jamais consacré à la mission Voulet-Chanoine. C'est dire à quel point le côté scandaleux de cette affaire a rebuté les historiens sérieux. Mais c'est dire aussi à quel point l'une des phases les plus importantes et les plus significatives de l'histoire de la conquête française de l'Afrique occidentale a été longtemps ignorée — volontairement ou pas — par les spécialistes. Il a donc fallu attendre la thèse de Mme Mathieu pour que cet oubli soit comblé.
Mme Mathieu s'emploie d'une part à restituer, si l'on peut dire, le rôle et l'importance historique — qui sont grands — de la mission, et d'autre part à démontrer que la mission ne pouvait pas ne pas se heurter à des difficultés graves. Ceci compte tenu premièrement des instructions reçues ; deuxièmement, de la manière dont la mission avait été constituée ; troisièmement, de rudimentaire et des fonds dérisoires dont la mission disposait ; et du peu de soutien du Ministère une fois la mission lancée. Ce qui revient à dire que Voulet et Chanoine ne furent pas les seuls responsables de cette affaire. Mais il y a mieux. Mme Mathieu met en doute la théorie suivant
Rev. franc. d'Hist. d'Outre-Mer, t. LXVII (1980), nos 246-247.