Rapport sur le calvaire de l’écriture en Tifinagh au Maroc
TIFINAGH : caractère de l’écriture au Nord
de l’Afrique |
La première langue
qu’ait connu le Nord de l’Afrique est la langue amazigh dont le
caractère Tifinagh a toujours été utilisé par les Imazighen dans
leurs écrits, productions et créations littéraires et artistiques.
Néanmoins
cette écriture a du subir sa première épreuve avec les vandales :
sous leur colonisation. Elle fut tellement présentée que quiconque en
connaissait l’usage était exterminé, le but avoué étant
d’extirper cette langue de sa zone d’utilisation.
Les
colonisations ultérieures adoptèrent la même politique de répression
et d’extermination de ses restes. Seuls y échappèrent, un peu plus
au Sud, les touaregs qui continuent encore , de nos jours à
l’utiliser.
Au Nord
, et dans le visiteur de leur résistance , les Imazighen (hommes et
femmes) essayèrent de sauvegarder leur écriture sous forme de
tatouages sur leurs corps ou comme dessins et motifs dans les
tapisseries et l’architecture.
Actuellement
, le visiteur des musées Nord africains peut en trouver des
traces et , à titre d’exemple , le musée national marocain de
Rabat en conserve sur pierre avec indication significative suivants :
« Ecriture ancienne ».
Cependant
, la situation de l’écriture amazighe en caractère Tifinagh a connu
un certain renouveau avec apparition du mouvement culturel amazigh sur
tout le territoire de Tamazgha. Au Maroc par exemple , la société
civile a donné naissance , depuis 1967 , à quelques dix huit (18)
associations culturelles amazighes dont l’objectif est l’affirmation
de l’identité amazighe et son enrichissement. Toutes militent
activement en vue de la reconnaissance
constitutionnelle de la dimension amazigh de notre identité
marocaine ; toutes participent à l’exercice des droits culturels
et linguistiques , et ce , conformément aux conventions et pactes
internationaux dans le domaine des droits de l’homme.
Malheureusement
, dans le cadre de l’exercice de ces droits , les militants de
ces association sont souvent fait l’objet d’arrestations arbitraires
et de répression pour le seul fait qu’ils aient écrit en caractère
Tifinagh. Ainsi , des enseignes de bureau , hôtels et établissements
commerciaux , écrits en Tifinagh , portées lors de défilé ouvrier du
1er Mai. Un citoyen ayant écrit en Tifinagh , s’est même
confisqué sa carte national. de façon très succincte , nous citons
quelques faits principaux et très significatifs. |
I -
En 1982 la pancarte d’un avocat à Rabat , a été arrachée pour
avoir porté une transcription en Tifinagh |
Croyant exercer
l’un de ses droits fondamentaux en s’exprimant ainsi dans sa langue
maternelle , cet avocat a fait l’objet d’une arrestation et d’une
garde à vue de dix jours pour « écriture en Tifinagh » et
ceci en violation flagrante de la procédure du code pénal qui limite
cette garde à vue à 48 heures. Même s’il n’a fait l’objet
d’aucune inculpation , les autorités qui ont arraché sa pancarde lui
ont signifié qu’il pourrait désormais l’écrire en toute langue
qu’il souhaite sauf le Tifinagh et ce jusqu’à ce que « les
autorités supérieures statuent sur l’objet ». |
II – En 1983 , deux enseignes d’Hôtels touristiques furent
arrachées à Agadir , pour la même raison , l’emploi du caractère
Tifinagh |
Il s’agit , en l’occurrence , des Hôtels TAMELLALT
et IGOUDAR. Des « instructions » leur parviennent
des autorités de la province d’Agadir et leur intimèrent l’ordre
d’effacer l’inscription en Tifinagh et de ne garder que celles
écrites en arabe et en français. Des photos prises à l’époque
témoignent encore de ce fait. |
III
– En 1994 : Saisi d’un calendrier écrit en Tifinagh , et
arrestation des membres de la section de TAMAYNUT à Inezgane. |
Restés pendant
un jour dans les locaux de la police judiciaire , qui a saisi tous les
calendriers écrits en Tifinagh et qui les a présentés au procureur du
Roi à Inezgane , ils furent libérés sans qu’aucune inculpation ne
leur soit notifiée. |
IV- 1994 : Saisie des banderoles
pendant le défilé du 1er Mai 1994 et arrestations et
jugement de 7 membres de l’association Amazighe « TILELLI ». |
Dans le cadre de la célébration du 1er Mai 1994
, des membres de Tilelli , également enseignants syndiqués ( syndicat
national de l’enseignement ) ont défilé avec des banderoles écrites
en Tifinagh , le lendemain ils furent arrêtés et présentés au
parquet qui les a poursuivis pour « incitation à des activités
dont l’intention est de provoquer des troubles , émission , sans
autorisation , de slogans portant atteinte aux principes de la
constitution et incitations à des activités qui porte atteinte à la sécurité
intérieure de l’Etat etc…Trois d’entre eux furent condamnés à
une année de prison ferme et dix mille (10.00,00)dirhams d’amende
(environ 2500$). Cette peine fut réduite à 3 mois de prison et cinq
cent dirhams (500 ) dirhams par la cour d’appel. ils bénéficièrent
de la grâce royale mais …après avoir purgé leur peine. |
V – en Mai 1994 , un écrivain public dont
l’enseigne était écrite en Tifinagh a failli rejoindre les militants
de Tilelli en prison |
Juste après l’arrestation de ceux
– ci , M Ali Chrouit , écrivain public à Goulmima , a été menacé
de prison par les autorités locales , s’il n’ôtait pas son
enseigne écrite en Tifinagh. Il dut obtempérer. |
VI – Juin 1995 ; Interdiction
du carnaval « Bi- Ilmaoune » à D’chira pour
l’utilisation du caractère Tifinagh et arrestation de plusieurs
participants |
Le carnaval « Bi- Ilmaoune »
est l’une des manifestations des fêtes de l’aide N’TFASKA. Les
jeunes dont certains sont procédé sont habillés de peaux de boucs
font le tour des quartiers ou des douars en chantant et en jouant
quelques sketchs traditionnels….
S’étant aperçu de l’utilisation,
pour la première fois , de l’écriture Tifinagh , les autorités
locales ont procédé à l’arrestation d’une trentaine de
participants qui furent relâchés par la suit , sauf l’un d’entre
eux sera présenté au tribunal et inculpé de « Rébellion »
…mais il a été acquitté. |
VII – 1996 : Saisie de
banderoles écrites en Tifinagh lors de la soirée musicale du chanteur
Iddir et interrogatoire du président de la section casa blancaise de
TAMAYNUT. |
Lors de la soirée musicale du
chanteur amazigh Iddir , trois banderoles écrites en Tifinagh ont été
par les autorités de Casa blanca et le président de la section de
TAMAYNUT à Casa fut convoqué pour interrogatoire dans les locaux de la
police le 12 / 6 / 96. |
VIII – Juin 1996 : les
autorités locales de Tarrast ( Inezgane) ont usé de menaces et de
pressions à l’encontre de citoyens avant écrit les enseignes de
leurs établissements ( une dizaine ) en caractère Tifinagh. |
L’ arrestation des militants de
TAMAYNUT pour avoir produit un calendrier amazigh , n’a pas empêché
une dizaine de leurs concitoyens de la même ville d’exercer leurs
droits culturels et linguistiques en écrivant les enseignes de leurs
locaux commerciaux en Tifinagh ….Mais , comme toujours les autorités
les ont obligés à faire disparaître uniquement l’écriture Tifinagh
de leurs enseignes. Pour protester contre ces pratiques illégales
certains ont également supprimé les parties écrites en arabe et en
français.
En conclusion , les faits évoqués plus haut dénotent
la détermination des imazighen à militer en vue de l’exercice
de leurs droits culturels et linguistiques, de la sauvegarde
de leur identité culturelle de leur écriture et son caractère
Tifinagh …., lesquels droits , rappelons – le , sont garantis
par les convention et pactes internationaux.Paradoxalement,
même si l’Etat marocain a souscrit à ces pactes et conventions
, les autorités publiques continuent dans la pratique à les
ignorer. En l’absence de la reconnaissance constitutionnelle
de la dimension amazigh de notre identité , une partie des citoyens
sont privés de l’un de leurs droits fondamentaux à savoir l’expression
orale et écrite dans leur langue maternelle. TUDERT
ITMAZIGHT ).(Vive Tamazight).
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Rapport établi le 8 /
7 / 96 par le président de TAMAYNUT
( Hassan Idbalkassm). |