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Guerre de l'information

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La guerre de l’information, également dénommée guerre informationnelle[1] ou infoguerre (en anglais : information warfare ou infowar), est l'ensemble des méthodes et actions visant à infliger un dommage à un adversaire ou à se garantir une supériorité par l'usage de l'information. Cela concerne avant tout :

  • l’acquisition d’information (données ou connaissances) stratégique à propos dudit adversaire ;
  • la dégradation de ses systèmes d'acquisition d'information et de communication ;
  • la manipulation et l'influence (notamment la désinformation et la subversion) de son opinion ;
  • plus généralement, la propagation soigneusement organisée et contrôlée, auprès de cet adversaire, de toute une diversité de messages au contenu destiné à servir la stratégie de son propre camp ;
  • la rétention d'informations pouvant servir à un adversaire.

Vocabulaire pluridisciplinaire

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L'expression guerre de l'information provient du vocabulaire militaire (surtout anglo-saxon) et de l’intelligence économique ou des technologies de l’information et de la communication.

Suivant le contexte, elle désigne aussi bien des actions d'influence sur l’opinion ou une forme quelconque de sabotage de l'image ou des institutions, au moyen de stratégies de communication, de recherche d'information légale ou illégale (espionnage industriel), et d'imposition de normes dans le domaine du traitement de l'information.

L’infoguerre se pratique sur un plateau de télévision, sur Internet, via des satellites, des logiciels. Elle n'est pas seulement menée par des pirates informatiques ou des « spins doctors » (manipulateurs de l’opinion). Des juristes, des militaires, des ingénieurs et chercheurs y prennent également part.

Domaines concernés

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La notion de guerre de l'information est valable à la fois en temps de guerre et en temps de paix.

En temps de guerre, la notion recouvre toutes les méthodes visant à surveiller, paralyser ou dissuader un adversaire (par exemple en détruisant ses systèmes de transmission ou en prenant le contrôle de ses réseaux informatiques).

En temps de paix, cette notion est plus générale :

Dans tous les cas, il s'agit de diriger l'opinion à travers des actions de guerre psychologique, de guerre de l'image, de mise en scène et de désinformation, destinées notamment à faire adhérer l’opinion internationale à sa cause, à diaboliser l’adversaire ou à démoraliser le camp adverse. Ici, guerre de l'information est synonyme de propagande, manipulation mentale ou, pour employer un euphémisme militaire, d'influence stratégique (on dit aussi : diplomatie publique, opérations psychologiques alias psyops, opérations psychologiques etc.).

Formes de l’infoguerre

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Différentes formes selon la nature des informations

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Un conflit d'intérêts fait apparaître les informations comme :

  • désirables (des bases de données, des images satellites, des codes d’accès, bref des renseignements qu'il faut acquérir) ;
  • vulnérables (des logiciels, des mémoires, des sites, des réseaux, les informations ou vecteurs d’information qui peuvent être faussés) ;
  • et redoutables (des virus, des rumeurs, bref tout ce dont la propagation est favorable à un camp et nuisible à l’autre).

Dans ce contexte, on parle souvent de la guerre « par, pour et contre » l’information :, mais il existe encore une autre forme : la gestion de la perception.

Par l'information et la communication

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  • Par la communication d'entreprise, en utilisant les réseaux professionnels, et en jouant sur le contexte culturel ;
  • Par l'information et la communication : en produisant des messages efficaces — qu'il s’agisse d'influencer au niveau international, de transmettre des instructions ou de rallier des partisans — mais aussi en gérant au mieux un savoir supérieur à celui de l’adversaire (voir gestion des connaissances), ou plus trivialement en fabriquant des virus informatiques. Dans cette perspective, l’information se transforme en arme ou en facteur de supériorité ;

Pour l'information

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Il s’agit cette fois de l’acquérir, comme on s’empare d’une richesse. Il est évident qu'il y a avantage à percer les secrets de l’autre, à se procurer certains renseignements pertinents sur ses intentions, sur l’environnement, ou certains brevets ou techniques : peu importe alors que la lutte se déroule sur le champ de bataille ou qu’elle vise à gagner des marchés ; on utilise tous les moyens de recherche d'information, comme les moteurs de recherche ; on s'emploie à améliorer l'efficacité des recherches en indexant les moteurs avec des données adaptées (voir métadonnée) ;

Contre l'information

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Quant au « contre l’information », il est la conséquence des deux premiers. Il faut s’attendre fort logiquement à ce que l’adversaire lutte lui aussi « par l’information », il faut donc prévoir des boucliers pour se protéger aussi bien d'une cyberattaque, d'une rumeur propagée par la presse et d'un stratagème, tout en protégeant ses bases de données.

Gestion de la perception (perception management)

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Une nouvelle forme de guerre de l'information est apparue aux États-Unis après la fin de la guerre froide. En effet, certaines nations alliées sur le plan politique, avec lesquelles les États-Unis entretenaient de bonnes relations économiques, sont devenues des adversaires géoéconomiques. Il s'agissait donc de considérer ces nations à la fois comme des alliés géopolitiques, et comme des adversaires géoéconomiques. Dans ce contexte, le département de la Défense américain (DoD) a imaginé le concept de perception management (en français : gestion de la perception) pour orienter les prises de décision des dirigeants des pays cibles en leur faveur. Ce concept se traduit en pratique par une manipulation de l'information[2].

La première occurrence de la guerre de l’information identifiée dans l'histoire occidentale fut lors de la Première Guerre mondiale[3] ou pour la première fois tous les médias sont mobilisés : journaux, affiches et tracts, cinéma, photographie, etc. Mais selon l'historien militaire Pierre Razoux, la première utilisation à grande échelle de la guerre de l’information remonterait à la Seconde Guerre mondiale. Dans le Pacifique, des émissions de radio pro-japonaises mais anglophones étaient animée par des jeunes femmes surnommées rose de Tokyo[4]. Depuis, la guerre de l’information s'est considérablement développée et notamment au cours des conflits suivants :

La guerre du Viêt Nam (1968)

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Au cours de la guerre du Viêt Nam, fin , période de trêve et de fête du nouvel an lunaire (le Têt). Dans la nuit du , les Nord-Vietnamiens attaquent par surprise une centaine de villes du Sud-Vietnam dont Hué et Saïgon. Dans la capitale, la première cible est l’ambassade américaine, cible particulièrement médiatique. Les combats sont féroces dans une offensive vietnamienne relevant de l’attaque suicide. Pendant plusieurs semaines les combats durent. Cette offensive totalement inattendue du fait de l’importance de la fête religieuse dans le pays, est déclenchée alors qu’un grand nombre de journalistes est concentré à Saïgon pour le Têt. Quand les Américains réussissent à repousser une armée nord-vietnamienne saignée à blanc par cette opération-suicide, l’opinion publique américaine, qui a suivi les combats quasiment en direct, est épouvantée. Offensive du Tết a fait basculer l’opinion publique et ainsi le cours de la guerre. Cette première mise en image de la guerre marque un tournant dans les relations entre les médias et les militaires[5].

À la suite de la défaite américaine lors de la guerre du Viêt Nam en partie due aux médias ayant influencé l'opinion publique mondiale, les États-Unis ne souhaitent pas faire la même erreur stratégique. Ainsi, durant la guerre du Golfe, les médias ont fait l'objet d'un contrôle accru de la part des autorités américaines. L’accès des journalistes aux champs de bataille a été particulièrement contrôlé. En contrepartie, les autorités américaines diffusaient aux journalistes des vidéos ne contrevenant pas aux intérêts nationaux[6].

Usages spécifiques en Russie

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Stéphane François et Olivier Schmitt soulignent l'usage de la guerre de l'information par le Kremlin au début du XXIe siècle. Le concept apparaît dans les documents officiels russes tels que la stratégie de sécurité nationale et la doctrine militaire. Vladimir Poutine le définit en 2012 comme une « matrice d’outils et de méthodes destinés à atteindre des objectifs de politique étrangère sans l’emploi de la force mais à travers l’usage de l’information et d’autres leviers d’influence ». Selon Stéphane François et Olivier Schmitt, elle s'appuie sur des « technologues politiques » dont le talent « consiste à manipuler les technologies de l’information, créant des drames virtuels au sens littéral du terme, car ils n’existent qu’à la télévision ; et en influençant le discours dominant sur les médias sociaux ». Le conspirationnisme en est un moyen prépondérant, le Kremlin diffusant « l’idée issue de la guerre froide, de la « main de l’étranger », c’est-à-dire l’action de la CIA et des banques américaines, derrière les contestations internes de son régime ». Les médias Sputnik et Russia Today, contrôlés par le pouvoir russe, constituent des vecteurs privilégiés, de même que les « usines à trolls » sur internet et « la mise en place d’un réseau de conspirationnistes et/ou de militants politiques (de gauche comme de droite) favorables à la Russie et à ses thèses »[7].

Notes et références

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  1. Céline Marangé, Maud Quessard (dir.), Les guerres de l'information à l'ère numérique, Presses Universitaires de France, (lire en ligne), p. 47
  2. Christian Harbulot, « De la guerre économique à la guerre de l'information »
  3. site de la Bibliothèque nationale de France, [1]
  4. The Legend of Tokyo Rose par Ann Elizabeth Pfau
  5. « grands-reporters.com/Vietnam-l… »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogleQue faire ?).
  6. « Espace presse », sur cnrs.fr (consulté le ).
  7. Stéphane François et Olivier Schmitt, « Le conspirationnisme dans la Russie contemporaine », Diogène, nos 249-250,‎ (lire en ligne, consulté le )

Bibliographie

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  • (en) James Adams, The Next World War : Computers Are the Weapons and the Front Line Is Everywhere, Simon & Schuster, , 368 p. (ISBN 978-0-7432-2380-5, lire en ligne)
  • (en) John Arquilla et David Ronfeldt, Networks and Netwars : The Future of Terror, Crime, and Militancy, Rand Corporation, , 380 p. (ISBN 978-0-8330-3030-6, [2])
  • Dario Azzellini et Boris Kanzleiter, Le business de la guerre, Gatuzain, , 264 p. (ISBN 978-2-913842-36-6)
  • Philippe Baumard et Jean-André Benvenuti, Compétitivité et système d’information, Dunod, , 249 p. (ISBN 978-2-225-83252-9)
  • Duncan Campbell et Héloïse Esquié, Surveillance électronique planétaire, Allia, , 169 p. (ISBN 978-2-84485-052-2, lire en ligne)
  • Éric Denécé et Claude Revel, L'autre guerre des États-Unis, économie : les secrets d'une machine de conquête, Allia, , 169 p. (ISBN 978-2-84485-052-2, lire en ligne)
  • Pierre Fayard, La maîtrise de l’interaction, Éditions 00H00, (ISBN 978-2-7454-0305-6)
  • Dominique Fonvielle, De la guerre... économique, P.U.F., , 233 p. (ISBN 978-2-13-050036-0)
  • Ludovic François (dir.), Business sous influence, Eyrolles, , 251 p. (ISBN 978-2-13-050036-0)
  • Philippe Guichardaz, Pascal Lointier et Philippe Rose, L’infoguerre : Stratégies de contre-intelligence économique pour les entreprises, Dunod, , 196 p. (ISBN 978-2-10-004065-0)
  • Jean Guisnel, Guerre dans le cyberspace : Services secrets et Internet, La Découverte, , 251 p. (ISBN 978-2-7071-2502-6)
  • Christian Harbulot (dir.) et Didier Lucas (dir.), La guerre cognitive : L'arme de la connaissance, Lavauzelle, , 251 p. (ISBN 978-2-7071-2502-6)
  • Christian Harbulot, La main invisible des puissances : Les Européens face à la guerre économique, Paris, Eyrolles, , 158 p. (ISBN 978-2-7298-3265-0)
  • François-Bernard Huyghe, L'Ennemi à l'ère numérique : chaos, information, domination, Paris, P.U.F., , 216 p. (ISBN 978-2-7298-3265-0)
  • François-Bernard Huyghe, Écran/ennemi : terrorismes et guerres de l'information, Paris, éd. 00h00, coll. « Stratégie », 2002.
  • François-Bernard Huyghe, Maîtres du faire croire : De la propagande à l'influence, Paris, Vuibert, , 174 p. (ISBN 978-2-7117-1194-9)
  • François-Bernard Huyghe, Olivier Kempf et Nicolas Mazzucchi, Gagner les cyberconflits : au-delà du technique, Paris, Economica, 2015.
  • Rémi Kauffer, L’arme de la désinformation, Grasset, , 306 p. (ISBN 978-2-246-55701-2)
  • Daniel Martin et Frédéric-Paul Martin, Cybercrime : Menaces, vulnérabilités et ripostes, P.U.F., , 304 p. (ISBN 978-2-246-55701-2)
  • Laurent Murawiec, La guerre au XXIe siècle, Odile Jacob, , 297 p. (ISBN 978-2-7381-0755-8, lire en ligne)
  • Alvin Toffler et Heidi Toffler, Guerre et contre-guerre : survivre à l'aube du XXIe siècle, Fayard, , 430 p. (ISBN 978-2-213-59197-1)
  • Daniel Ventre, Information Warfare, 2nd Édition, 352 pages, Wiley-ISTE,
  • Paul Virilio, Stratégie de la déception, Galilée, , 87 p. (ISBN 978-2-7186-0524-1)
  • Michel Wautelet, Les Cyberconflits : Internet, autoroutes de l'information et cyberespace : quelles menaces ?, Éditions Complexe, , 102 p. (ISBN 978-2-87027-711-9)

Articles connexes

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Liens externes

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