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ALPINE |
Alpine A710 (projet W71) : l'Alpine sacrifiée... |
Des phares de forme relativement classique sur le premier prototype (en haut) mais sur le second, l'avant rappelle le roadster concept Laguna de 1990, développé d'ailleurs sur la même plateforme que la W71. Trois configurations furent envisagées pour l'arrière de la nouvelle Berlinette : 4 phares ronds sur le premier prototype et deux phares rectangulaires sur le second. Le tableau de bord spécifique de l'A710 était un peu plus sophistiqué que sur une voiture de course, mais manquait un peu de raffinement pour séduire le grand public. Sur le second prototype, une console centrale et des aérateurs seront finalement incorporés pour rendre le modèle plus attrayant. Le moteur en porte à faux arrière traditionnel sur les Alpine est abandonné au profit d'un bloc Williams avec boîte 5 vitesses, monté transversalement en position centrale arrière. Un espace plus que réduit permettant à peine de mettre un petit bagage à main... |
Durant les années 80, Alpine cherche sa voie. De plus en plus phagocytée par la tutelle de Renault, la marque dieppoise peine à exister et à faire valoir des projets qui lui soient propres. Or depuis les années 70, aucun modèle n'a réellement pu prendre la place de la légendaire A110 Berlinette, qui fait encore le bonheur des amateurs sur de nombreux circuits. Renault a réussi avec le programme X50 à donner une suite à l'A310, sous la forme de l'Alpine GTA, puis de la V6 Turbo. Mais les Alpine demeurent des modèles chers et réservés à une élite de pilotes chevronnés, amateurs de sensations sportives. Pour faire vivre l'usine dieppoise, il convient donc d'élargir la gamme et de proposer, en plus d'une routière sportive haut-de-gamme, un petit coupé léger, moderne et accessible à tous : ainsi sont donc lancés les programmes A610 et A710. Le développement du projet est lancé en 1989 et confié au Berex, centre de recherche qui a développé divers prototypes pour la Régie et surtout la plupart des Alpine. Il s'agit de construire deux prototypes pour démontrer la viabilité du projet et expérimenter différentes solutions techniques et esthétiques. On parle alors de 3 motorisations différentes, notamment le moteur central arrière de la Clio Williams de 150 cv, qui correspond tout à fait à la philosophie Alpine et qui sera essayé sur les prototypes. Malgré une configuration générale similaire, les deux prototypes W71 sont très différents l'un de l'autre : le premier, immatriculé "1990 W 71" (un clin d'oeil au code projet et à son année de fabrication) présente des phares avant horizontaux et relativement classiques, avec les feux de position aux extrémités, et deux paires de phares ronds à l'arrière ; le pot d'échappement présente deux sorties séparées, une de chaque côté. Le second prototype, lui, présente des optiques de forme originale qui englobent les anti-brouillards, tandis qu'à l'arrière, les feux sont beaucoup plus standards ; le pot d'échappement double est placé au centre, intégré à la carrosserie. Il existe également des différences internes, avec par exemple la présence ou non d'aérateurs et d'une console centrale. Si les deux prototypes de la W71 sont réalisés, on sait que l'un des deux au moins roula, probablement le deuxième, qui possédait une véritable immatriculation... dans l'Yonne ! La W71 pèse environ 900 kg. Le châssis poutre a été abandonné au profit d'une coque autoporteuse en acier, tandis que le moteur est en position centrale arrière. La petite Alpine doit reprendre à son compte un certain nombre de solutions validées par le concept Laguna, issu du crayon inspiré de Jean-Pierre Ploué, et présenté au Mondial de Paris en 1990. Selon Serge Rossi, ancien ingénieur au Berex, "c'était une très impressionnante voiture qui, par sa qualité de réalisation, ne faisait pas du tout penser à un prototype mais donnait immédiatement envie d'en prendre le volant et d'aller découvrir ses possibilités". Dotée de très bonnes accélérations, d'un excellent freinage et d'une tenue de route remarquable, la W71 fait le 1000 mètres départ arrêté en 26.7 s, possède une vitesse de pointe de 210 km/h, et sur un même circuit d'essai, elle prend même de 2 à 2.5 s à l'A610, sa grande soeur ! Son défaut ? Il s'agit d'une stricte deux places, qui n'offre de surcroît quasiment aucun espace de rangement, avec un coffre avant inutilisable et un espace de rangement très réduit devant le moteur. Si elle avait été commercialisée, l'A710 aurait vendue environ 150000 francs, ce qui pour une Alpine était un prix fort raisonnable ; mais il faut dire aussi qu'elle ne possédait ni vitres électriques, ni climatisation... éléments de confort jugés "superflus" par ses concepteurs. C'est d'ailleurs sur ce point qu'achoppa l'ensemble du programme : lorsque les commerciaux de Renault voulurent ajouter une direction assistée, des vitres électriques et plus de confort dans l'habitacle, on se rendit compte que la facture allait très vite monter et les performances diminuer d'autant... Le poids de plus d'une tonne et le prix de vente de 180000 F ne firent pas l'unanimité. Louis Schweitzer, président de la Régie, estima que le projet ne serait pas viable, et comme le programme avait déjà englouti 600 millions de francs, jugea préférable de le stopper net, préférant se recentrer sur la marque Renault pour proposer un petit véhicule sportif... ce sera le Spider, en 1995, élaboré justement sur la même plate-forme que la W71 et le concept-car Laguna, et motorisé par le bloc F7R de la Mégane 2 litres 16S, le même qui aurait dû également équiper l'A710 de série. La production du Spider cessera hélas après deux ans au catalogue et seulement 850 exemplaires construits. L'A610 ne fera guère mieux. L'esprit de la W71 sera brièvement ressuscité sous la forme du concept-car Z11 Berlinette Renault Sport, un roadster dont la présentation au public (et a fortiori la possible production en série) fut finalement annulée. Et une fois de plus, le modèle de production qui aurait pu en découler restera dans les cartons... Le même fiasco accompagnera le projet de produire en série la Z16 Wind mais pour d'autres raisons, et désormais, on annonce pour 2010 un petit roadster (code projet W19) qui prendrait tout simplement le nom de... Renault Alpine ! Stéphane BEAUMORT Les lignes de la Helem V6, un Spider recarrossé et remotorisé, rappellent un peu celles de l'A710.
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A410 ou A710 ? Les deux noms ont circulé... Le logo qui figure sur l'aile avant gauche du second prototype lève toutefois pour de bon l'ambiguïté. Le coffre, situé comme il se doit à l'avant et réduit à sa plus simple expression, ne pouvait contenir aucun bagage ! La crémaillière de direction était empruntée à la première Clio Cup. Frédéric Werli, ancien d'Alpine, au volant de l'A710. On aperçoit bien la grande entrée d'air latérale pour le refroidissement du moteur. Les deux prototypes W71 sont entreposés à Flins, dans les réserves de la collection Renault., protégés par des bâches. A ce jour, Renault n'a toujours pas officiellement levé le voile sur le programme W71.
Pour être complets, voici deux illustrations tirées de la presse automobile de l'époque. La première montre un design assez insipide, tandis que la seconde présente des lignes peu homogènes. Présentée par le carrossier indépendant Hommell au Salon de l'Auto 1992 (soit deux ans après la W71) la Berlinette Echappement (du nom de la revue qui organisa un concours pour la dessiner) n'était pas une Renault, mais offrait quelques similitudes stylistiques avec les prototypes Alpine... |