Mutilation volontaire
Une mutilation volontaire ou automutilation est, dans le cadre militaire, l'acte par lequel une personne se blesse elle-même, en l'absence de problèmes psychologiques sous-jacents, dans l'objectif d'en tirer un avantage. En droit français, la mutilation volontaire est « le fait pour tout militaire de s'être rendu volontairement impropre au service, soit d'une manière temporaire, soit d'une manière permanente, dans le but de se soustraire à ses obligations militaires »[1].
Typologie
[modifier | modifier le code]Nombre de mutilations volontaires consistent à tirer sur ses propres mains, bras, jambes et pieds. Une personne peut aussi choisir de laisser évoluer une blessure mineure en négligeant volontairement de la soigner.
Histoire
[modifier | modifier le code]La mutilation volontaire est parfois pratiquée par des prisonniers dans des prisons et camps de travaux forcés pour se soustraire aux corvées et bénéficier d'un séjour, relativement moins pénible, dans une infirmerie ou dans une caserne.
« Les législateurs de la fin du XIXe siècle concevaient la mutilation volontaire comme un phénomène précédant la conscription dans le but de se soustraire à l’incorporation. Considérée par les militaires comme une pratique civile, elle relevait jusqu’en 1914 de la compétence des tribunaux de droit commun »[2].
Pendant la Première Guerre mondiale, des soldats engagés par conscription pratiquent la mutilation volontaire pour être retirés du front. À partir de 1914, l'état-major français entreprend de fusiller des soldats pour l'exemple afin de dissuader ces pratiques[2]. Les médecins militaires, alertés sur le sujet, examinent les blessures afin, par exemple, de déceler « les traces de poudre subsistant autour du point d’entrée de la balle »[3]. À cette époque, de nombreux rapports sur des mutilations volontaires laissent planer un soupçon sur des soldats, même si ces blessures pouvaient être des accidents authentiques[4]. Dans certains cas, elle n'est que supposée, car « il était parfois impossible de différencier une mutilation volontaire d'une réelle blessure de guerre ». C'est ainsi que des soldats pourtant blessés par l'ennemi sont conduits au poteau d'exécution[5].
Le Corps expéditionnaire canadien a recensé 729 cas d'automutilation mais « beaucoup d’autres sont passés inaperçus »[6].
Châtiment
[modifier | modifier le code]Dans la plupart des armées, les mutilations volontaires sont vues comme de graves infractions.
Dans l'armée britannique, pendant la Première Guerre mondiale, le châtiment pour une blessure auto-infligée (décrite comme : Wilfully maiming himself with intent to render himself unfit for service), selon la section 18 de l'Army Act 1881, était l'emprisonnement et non la peine capitale. Dans cette armée, 3 894 hommes ont été reconnus coupable de cette infraction et emprisonnés pour de longues durées[7],[4].
Dans les camps de concentration nazis, l'auto-mutilation était une tactique dangereuse car les personnes incapables de travailler finissaient souvent exécutées.
Dans la culture
[modifier | modifier le code]Le roman Un long dimanche de fiançailles montre « le parcours de Manech, personnage qui ouvre le roman par une mutilation volontaire »[8].
Dans Le Secret de la Salamandre, tome 5 des Aventures d'Adèle Blanc-Sec par Jacques Tardi, le soldat Lucien Brindavoine s'entaille le bras avant de le panser volontairement d'un bandage infecté. Cela lui vaut l'amputation à cause de la gangrène, mais aussi la démobilisation[9].
Dans la bande dessinée Mauvais Genre de Chloé Cruchaudet, Paul (inspiré de Paul Grappe) s'ampute d'un index et prétend qu'un éclat d'obus l'a arraché afin d'être retiré du front[10].
Notes et références
[modifier | modifier le code]- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Self-inflicted wound » (voir la liste des auteurs).
- « Code de justice militaire (nouveau). Section 4 : De la mutilation volontaire. (Articles L321-22 à L321-24) », sur legifrance.
- « Les fusillés de la Grande Guerre. Les mutilations volontaires », sur reseau-canope.fr.
- « Mutineries, désobéissance et révoltes dans les tranchées de la Grande Guerre », sur buclermont.hypotheses.org, .
- Blighty Wounds « https://web.archive.org/web/20080522001150/http://www.spartacus.schoolnet.co.uk/FWWblighty.htm »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?),
- Olivier Renault, « Qui étaient les fusillés de la Grande Guerre ? », Ouest-France, (lire en ligne).
- « Les effets d’un mauvais moral », sur Musée canadien de la guerre.
- First World War.com - Encyclopedia - Self-inflicted Wounds (SIW)
- Saint-Fuscien 2013.
- Jacques Tardi, Les Extraordinaires Aventures d'Adèle Blanc-Sec, Tome V – Le Secret de la Salamandre (Bande-dessinée), Bruxelles, Casterman, , 48 p. (ISBN 2203305061)
- Chloé Cruchaudet, Mauvais Genre, Paris, Delcourt, coll. « Mirages », , 160 p. (ISBN 978-2-413-00983-2)
Annexes
[modifier | modifier le code]Article connexe
[modifier | modifier le code]Documentation
[modifier | modifier le code]- Emmanuel Saint-Fuscien, « Les mutilations volontaires au cours de la Grande Guerre : un geste impensable ? », sur openedition.org,
- « Les fusillés de la Grande Guerre. Les mutilations volontaires », sur reseau-canope.fr.
- « Code de justice militaire (nouveau). Section 4 : De la mutilation volontaire. (Articles L321-22 à L321-24) », sur legifrance.